Pourquoi ce blog et comment le lire ?

Cette page, qui n'a pas la prétention d'être exhaustive, est un hommage rendu aux hommes du 36e régiment d'infanterie que mon arrière-grand-père, Fernand Le Bailly, a côtoyés, parfois photographiés pendant la Première Guerre mondiale. Elle souhaite conserver et transmettre leur souvenir. Elle est conçue à partir de témoignages, d'écrits et d'archives personnels qui m'ont été envoyés, en partie par des descendants de soldats du 36e. Elle est aussi un prétexte pour aller à la rencontre d'"invités" – historiens, passionnés de la Grande Guerre, élus, écrivains... – qui nous font redécouvrir aujourd'hui ce titanesque conflit. Elle est enfin un argument pour découvrir tous les prolongements de ce gigantesque conflit dans le monde d'aujourd'hui.
Comment consulter cette page ? Vous pouvez lire progressivement les messages, qui ne respectent pas un ordre chronologique (ils évoquent, par exemple, l'année 1915 ou 1914). Vous pouvez aussi avoir envie de vous attarder sur une année ou un secteur géographique : pour cela, cliquez dans la colonne à gauche dans la rubrique "Pages d'histoire du 36e" sur la période et le lieu qui vous intéressent. Tous les messages seront alors rassemblés pour vous selon l'ordre de publication.
Comment rentrer en contact ? Pour de plus amples renseignements sur ce site, ou me faire parvenir une copie de vos documents, vos souvenirs ou remarques, écrivez-moi. Mon adresse : jerome.verroust@gmail.com. Je vous souhaite une agréable lecture.

Avertissement : Si pour une raison quelconque, un ayant-droit d'une des personnes référencées sur ce site désire le retrait de la (les) photo(s) et des informations qui l'accompagnent, qu'il me contacte.

26 sept. 2010

"Une nuit dans les tranchées devant Reims"

Ci-contre : une carte intitulée "Faßbrücke bei Courcy (bei Reims)" ("Pont flottant près de Courcy, à proximité de Reims"), envoyée en 1915.

Voici le deuxième et dernier extrait que Paul chevalier consacre, dans son carnet de guerre, aux tranchées de Courcy. L'auteur s'est-il inspiré de la panique qui s'empare de la brigade dans la nuit du 8 au 9 novembre 1914 ? Quelques indices pourraient le laisser penser.

"La journée n’a pas été trop troublée ; le canon s’est fait entendre. Quelques aéros ont survolé nos lignes. Le jour diminue faisant place à la nuit ; il fait froid. Chacun a sa place maintenant ; pas un feu, même pas une cigarette, pas un cri, pas un mot : les ordres se communiquent à voix basse. Nos sentinelles sont placées à 20 mètres de nous. Chacun à sa place guette ; il fait nuit noire. Pan ! Un coup de feu à notre droite : c’est une sentinelle qui vient de tirer, puis un silence. Chacun regarde devant lui le mieux possible, mais à mon poste d’observation je ne vois rien, j’entends seulement le bruit du vent et, dans le lointain, une fusillade mêlée de canonnade. On se parle d’oreille à oreille, une patrouille est sortie pour voir ce qui se passe ; faire bien attention à ne pas tirer sur eux.
"La fusillade se rapproche. C’est un bruit qui arrive petit à petit comme la marée.
(Et) Nos chefs de surveiller le mieux possible. Hélas, il fait tellement nuit que nous ne voyons pas à quatre mètres devant nous. A gauche (vers le bois de Chauffour, NDLR) , la mitraille gagne. Des ordres sont donnés : nous sommes attaqués. Les hommes tirent sans arrêt. Le bruit devient terrible. Les hommes se disent : "Et notre 75, on ne l’entend pas." Le ciel est éclairé par de grandes lueurs et des éclairs qui sillonnent à droite et à gauche. Quelle nuit horrible ! La fusillade continue. Tout à coup, nos batteries ouvrent le feu, les obus passent sur nos têtes et éclatent devant nous. C’est un bruit infernal. En arrière de nos lignes, les canons de sièges envoient de gros obus sur les positions occupées par l’ennemi ; pour mettre le comble, leurs canons ouvrent le feu et crachent des obus et des boîtes à mitraille sur nous. Un nuage de fumée et de poussière nous envahit. On ne distingue plus l’un de l’autre tellement le feu est ardent. On croirait être éclairés par des lampes à ???. Jamais un homme ne pourrait franchir la ligne de feu. C’est un enfer ; pas un endroit n’est intact ; partout la mitraille tombe, les balles sifflent au-dessus de nous, de ces sifflements de reptiles, ou viennent s’aplatir devant nos parapets. Que ces moments nous semblent des heures.
Enfin, l’on sent un ralentissement de l’intensité. Du feu, nos batteries se lassent ; les batteries allemandes ont cessé aussi... Peu à peu, la fusillade diminue, puis le silence de la nuit fait place à ce terrible cauchemar. Chacun regarde autour de lui, content de revoir des camarades, car dans notre compagnie, les pertes ont été insignifiantes ; puis peu à peu, chacun reprend son calme et l’attente continue. De temps en temps, le canon se fait entendre, puis quelques coups. Un silence de nuit passe sur nos têtes ; cela fait une drôle d’impression . Le reste de la nuit se passe dans le calme. C’est là les heures les plus pénibles, car la réflexion se met de la partie. L’on songe aux êtres qui vous sont chers, restés là-bas, qui, en ce moment, dorment et ne pensent pas à vous ; oui cela est terrible. Enfin, les étoiles disparaissent et l’aube arrive. Les alouettes commencent à chanter et le jour tant demandé apparaît."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire